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Paul Marchesseau, l’art du faux plus beau que nature

Salles de bains en marbre, panneaux en bois précieux, mobilier et tapis de haute facture… L’image véhiculée par l’architecture d’intérieur est celle d’une discipline luxueuse, gourmande en matières premières, globalement déconnectée des enjeux écologiques de notre époque. Pourtant, même dans cet univers, les choses évoluent, et en grande partie grâce à la nouvelle génération d’architectes et de décorateurs.
Né en 1988, Paul Marchesseau, à la tête d’Emilieu Studio, s’interroge depuis ses débuts sur l’impact carbone de ses projets, de la fabrication de mobilier à l’aménagement d’intérieur : « Le plus gros impact dans un chantier, c’est le transport de la matière première. Je suis donc vigilant sur la traçabilité des matériaux. » C’est d’ailleurs cette question qui l’a amené à la peinture décorative. Une technique ancienne, tombée en désuétude, consistant à embellir des surfaces basiques en imitant des matériaux précieux grâce à la technique du trompe-l’œil.
Lorsque l’école d’architecture d’intérieur et design Camondo, dont Paul Marchesseau est sorti diplômé en 2013, construit son antenne toulonnaise, il y a trois ans, l’équipe fait appel à Emilieu Studio pour en signer l’aménagement. Le designer choisit alors de créer du mobilier modulable, sur roulettes, conçu avec des chutes de contreplaqué maritime issu de chantiers voisins et orné de motifs imitant les minéraux locaux du Var par le peintre-décorateur Pierre-Yves Morel. « Je prône le faux », revendique Paul Marchesseau.
Cette démarche fait écho à ce qui lui a été transmis par ses parents paysans, puis meuniers dans les Deux-Sèvres. « Les meuneries et les installations agricoles de mon père ont été majoritairement réalisées avec des carcasses d’anciennes usines que nous avons démontées avec des ferrailleurs. Dans le milieu rural, c’est assez courant. »
Aujourd’hui, cet adepte du réemploi applique la technique du trompe-l’œil sur différentes typologies d’objet, comme ces lampes fabriquées à partir de pieds de la table Lack, d’Ikea. « L’enjeu est d’imaginer des objets désirables et d’utiliser les arts décoratifs pour montrer que l’écologie peut être synonyme de beauté », dit-il. Plutôt optimiste sur l’éveil des consciences, le jeune designer cite volontiers en exemple les déchetteries transformées en recycleries et ressourceries ou encore Bouygues, qui développe des entrepôts spécialisés dans le réemploi, à travers sa filiale Cyneo.
Dans cette idée d’ennoblir ce qui est considéré comme un déchet, le premier projet de Paul Marchesseau était une œuvre lumineuse créée à partir de vélos issus des stocks dormants de la Ville de Paris. Imaginée en collaboration avec l’artiste Yann Toma, « Dynamo Fukushima » invitait, en 2011, les visiteurs du Grand Palais à pédaler pour éclairer des ballons géants. Une expérimentation intéressante : « Chaque projet est pilote mais aussi très chronophage. Inventer des procédés est beaucoup plus fatigant et incertain que de ­s’inscrire dans des pratiques existantes. »
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